Les chats nous hypnotisent-ils ?

Les chats nous hypnotisent-ils ?

Les chats nous hypnotisent-ils ?

Mais d’où me vient entre deux publications me prévenant d’un éventuel complot, ce besoin de cliquer sur les vidéos de chats ? Pourquoi en les regardant évoluer devant une caméra je commence à fondre, à sourire ?

J’apprends de Dmitri Beliaiev (biologiste) que dans leur évolution au contact des hommes, les animaux domestiques ont développé des caractéristiques infantiles visant à stimuler notre compassion, notre attention. Oui, les chats sont mignons, ils ont oeuvré pour ça, depuis des millénaires ils complotent et grâce au concours d’internet, il arrivent à leurs fins !

Cette volonté anthropomorphique de prêter aux animaux des pensées et des actions humaines ne date pas des Lol-cats. Il suffit de songer aux différents contes et fables de notre enfance, ceux de Perrault, de la Fontaine où les personnages incarnent des caractères bien humains. Plus loin encore ? La bible et son serpent tentateur.

Je m’étonne également de la classification arbitraire que j’applique au règne animal. Pourquoi suis-je plus facilement du coté du mammifère que de celui du reptile et du poisson. Pourquoi lors d’un combat entre un lion et un buffle, je trouverais la mort du lion plus injuste et triste que celle du buffle.
Si je suis attentif à cette classification j’ai l’impression que je privilégie dans l’ordre, l’intelligence, puis la beauté, et la loyauté. Bien sur, cette classification subjective me renvoie à moi-même, elle s’établit sur une règle fondamentale : le besoin de ressemblance.

Cette recherche de ressemblance qui caractérise un bon nombre d’être humains, soulage et rassure, sans doute…. Mais une certaine forme de paresse, un manque de vigilance intellectuelle peuvent également me pousser à “forcer”  cette ressemblance en attribuant à l’autre, humains, bestioles, des fonctionnements qui me sont propres et à me convaincre que ce que je projette est une réalité universelle. (C’est ce qu’on appelle un biais cognitif de confirmation)

Cependant, cette façon de procéder bien humaine peut jouer contre nous. J’ai sous la plume ce témoignage d’un pompier sauvant d’une mort certaine, un chien à la dérive sur un bloc de glace dérivant sur un fleuve du canada. Convaincu que le chien le reconnaîtrait comme son sauveur, c’est sans aucune précaution qu’il saisit le chien qui en retour de ses bons soins le mord au visage. Au delà de la douleur physique, le pompier fait alors part de sa peine, quand amer, il constate que le rapport qu’il projetait n’existait que dans sa tête.

Bien sûr, les récentes études éthologiques révèlent des fonctionnements particulièrement singuliers chez les animaux qui peuvent nous apparaître comme semblables. Principalement les stratégies de coopération. Mais en y réfléchissant, il semble parfaitement absurde d’attribuer aux animaux des intentions humaines.

Revenons-en à l’objet de cet article, les chats ! Pourquoi eux ? Parce que contrairement aux chiens, les pensées et les actes que spontanément je leurs prête peuvent être aussi sombres que lumineux, à mes yeux ils sont capables du meilleur comme du pire, ils me semblent agir à dessin, pire je les croient conspirateurs. Cette large palette comportementale, leur incroyable pouvoir de forcer la sympathie, peut me pousser à regarder d’un oeil attendrit et indulgent la représentation de mes propres défauts. Les chats sont un révélateur mignon de mes sales comportements d’humains, comme les bouffons de cour en un temps, présentaient le reflet de notre grotesque.

En thérapie, cette volonté de forcer la ressemblance porte un nom, la projection et elle se propose également dans nos communications les plus quotidiennes d’humain à humain. Par la généralisation de ce qui est dit dans une conversation par exemple. Quand nous racontons quelque chose, nous évinçons sans y prendre garde, de nombreuses informations par le présupposé suivant : nous pensons que l’autre sait de quoi on parle. Ça peut facilement donner lieu à des incompréhensions voir des conflits.

Lors d’un accompagnement thérapeutique, un hypnopraticien va s’efforcer de porter sur la personne avec laquelle il travail, un regard neutre, sans projection. De mon point de vue, c’est une grande qualité de thérapeute d’accepter de ne pas savoir pour l’autre.  Bien sûr les clients qui nous consultent le font pour notre expertise, et peuvent un premier temps, s’étonner de ne pas s’entendre donner des conseils, des solutions. Mais rapidement, ils découvrent avec plaisir que dans ce regard neutre du thérapeute, ils s’offrent la possibilité de créer d’eux même leur propre solution. De la même façon qu’ils sont uniques dans la problématique qu’ils ont créé, ils sont uniques dans la solution qu’ils construisent.

Alors non, les chats ne m’hypnotisent pas, je leur prête juste ce pouvoir un instant, puis avec raison en cette fin d’article, je me prends à rêver d’un monde où l’on s’efforce de lutter contre ce besoin de ressemblance. Que ce soit pour les chats, et bien sur pour les hommes. Il y a matière à se nourrir quand on recherche la différence et le banquet est large, retrouvons cette gourmandise enfantine si bien décrite par  Saint Exupéry :
“Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis.”

A PROPOS DE L'AUTEUR

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Hypnopraticien, Coach, Formateur en analyse comportementale

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